Tiferdoud ou l’art de l’autosuffisance |Fr|

16.09.17
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Le blog TravelinAlgeria nous fait découvrir ici un village kabyle au caractère bien trempé, et qui nous rappel que vivre est avant tout un art qui n’attend pas.

Dernièrement, j’ai eu la chance de visiter Tiferdoud, un petit village situé dans la wilaya de Tizi Ouzou. Pour y arriver, il faut compter six heures de route aller-retour en passant par l’autoroute puis les petites nationales en pleine montagne. Un trajet long mais sans regrets puisqu’une fois arrivée sur les hauteurs, la route offre une vue magnifique sur le massif du Djurdjura.

A Tiferdoud, la vue est toute aussi belle. Le village culmine à 1197 mètres d’altitude et ses habitants ne manquent pas l’occasion de rappeler qu’ils vivent dans le lieu habité le plus haut de Kabylie. Cette année, les 1500 âmes de Tiferdoud ont attiré l’attention des médias et des curieux car ils ont transformé le visage de leur commune tout en conservant ce qui fait le charme et le caractère des villages de montagne.

 

Trois hommes venus visiter les lieux se dirigent vers la Tadjmaat en passant par la zone piétonne du village.

 

Ici, les gens ont appris à compter sur eux-mêmes. Les habitants se connaissent les uns les autres et maintiennent les principes de vie inculqués par les anciens : solidarité, hospitalité et travail sont de mise. Tiferdoud, c’est une entreprise où chacun à une tache particulière. Puisque les pouvoirs publics tardent à agir, ce sont les habitants qui ont pris les choses en main. Les immigrés, qui vivent principalement en France, envoient de l’argent, les familles du village se cotisent, les têtes pensantes élaborent les projets et tout le monde participe aux chantiers.

 

Une rue du vieux village, dallée et repeinte par les habitants.

 

En deux ans, un stade de foot pour les jeunes, une crèche, un musée honorant 28 martyrs du village morts pour l’Algérie, une maison des jeunes, un parc pour enfants ont été créés. Pour un coût qui avoisine déjà les 20 millions de dinars. Heureusement, les pouvoirs publics ont compris l’intérêt de ces actions et ont financé tout ou partie de certains projets. Pour gérer ces structures, les villageois se relaient. Si une personne est absente, un suppléant prend en charge la surveillance d’un lieu qui lui est assigné.

 

“On se retrouve ce soir pour nettoyer la rue”, dit une mère de famille qui habite non loin. Depuis quelques mois, elle gagne sa vie grâce à son petit salon de coiffure pour femmes.

 

 

Les doyens du village de Tiferdoud. “L’huile d’olive, ça conserve”, lance un habitant qui présente ce couple presque centenaire.

 

 

La vue sur Tiferdoud depuis le minaret de la mosquée du village.

 

Ce village fonctionne telle une machine bien huilée. Une collectivité où chacun met du sien pour maintenir la propreté des lieux. Les couleurs blanche et ocre réchauffent les façades. Des peintures à l’image de la vie en Kabylie ont été placées sur les murs. Pour enterrer les morts proprement et leur offrir une derrière prière à l’abri des caprices de la nature, un chapiteau a été construit en quelques mois, grâce à un seul donateur. Et enfin… Les rues du village mènent toutes vers un lieu : la Tajmaat, l’assemblée où siègent plusieurs hommes qui prennent des décisions concertées. L’un d’eux, cheveux grisonnants et sourire malicieux me dira, « si un enfant de dix ans nous donne une bonne idée alors on l’appliquera. C’est ça la démocratie ».